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28 février 2010 7 28 /02 /février /2010 01:45

Pour la dernière soirée « Scène Grand écran » de l’année, le Manège propose deux variations sur le thème du chef d’orchestre, démiurge tout puissant le temps d’une symphonie.

En première partie, le chorégraphe Xavier Le Roy, seul en scène, fait le chef, et le public l’orchestre, pour réinterpréter le ballet de Stravinsky, le Sacre du Printemps. (Voir encadré).
 
En seconde partie sera projeté « Infidèlement vôtre ». Un peu moins connu aujourd’hui que les autres grands noms de la comédie américaine des années 1930-40, son réalisateur, Preston Sturges, n’en fut pas moins l’une des figures les plus brillantes, et ne démérite aucunement face à Lubitsch, Capra, Cukor ou Hawks. Comme bien des joyaux de cet âge d’or du dialogue, « Infidèlement vôtre » est un chef d’œuvre à côté duquel la plupart des comédies sentimentales hollywoodiennes contemporaines font figure d’insipides guimauves. Un cinéma issu du croisement entre la verve étincelante de Guitry et le sens du burlesque de Buster Keaton. 
A la fois bavard et très visuel : des répliques qui fusent et font mouche avec la vivacité la plus jubilatoire, dont la puissance est décuplée par une inventivité scénaristique diaboliquement malicieuse et des scènes dont le comique visuel ose l’outrance la plus absurde sans que jamais on ne se dise « Il en fait trop. »
Là est le génie de ce film : dans le burlesque ordinaire, la maladresse crée le chaos et appelle la catastrophe, comme l’abîme appelle l’abîme, dans un effet boule de neige que rien ne peut enrayer.
Ici, Preston Sturges détourne avec virtuosité ce principe dont il cisèle un inénarrable morceau de bravoure qui vaut à lui seul le détour. Dévoré par la jalousie, un chef d’orchestre (Rex Harrison) échafaude pendant un concert de machiavéliques scénarios dans lesquels le public est happé, subjugué par la puissance artistique que lui insufflent les tourments de sa passion. En situation de despote absolu, il fait naître le tragique : mais l’inertie des choses et leur impitoyable résistance le rappellent à l’ordre du réel… et de la comédie. Le tout en musique, chaque état d’âme ayant son compositeur attitré : Rossini, Wagner, ...
Un délice.


Un concert en mime
Au moment où est présenté à Cannes un deuxième opus sur la vie de la couturière Chanel,  « Coco Chanel et Igor Stravinsky » de Jan Kounen, le compositeur russe se voit offrir une réinterprétation originale de son « Sacre du Printemps » par Xavier Le Roy. Il ne s’agit pas pour le chorégraphe de singer les mimiques caractéristiques du métier, déguisé avec la traditionnelle queue de pie. Il s’agit de donner à voir le processus « démiurgique » qui traverse le chef d’orchestre symphonique, comme il a traversé le compositeur au moment de la création. Le rêve de tout politicien. Imaginez un instant que la chambre des députés obéisse aux injonctions de la baguette ministérielle avec la docilité des pupitres instrumentaux. 
Peut-être d’ailleurs pourrait-on définir la musique comme ce qui échappe aux résistances  et aux dissonances de la réalité, comme l’exact contraire de la vie politique ? Une utopie sonore.
Car il y a pourtant une certaine jubilation à se laisser ainsi diriger d’une main de maître par un virtuose sûr de son geste. C’est ce plaisir que pourra éprouver demain soir le public de Manège, puisque la musique surgira des gradins à l’appel du maestro. 
Le chef d’orchestre, ou la tentation de la toute puissance.

Publié dans l'Union sous nom marital le 27 mai 2009
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28 février 2010 7 28 /02 /février /2010 00:47

Les 24 et 25 avril prochains, la Médiathèque Cathédrale participe à la onzième édition du Festival International des « Très Courts » (métrages). Reims est l’une des 80 villes de par le monde à accueillir la projection de ces pépites de cinéma.
Du très court, du très varié, pour tous les goûts. 

Après une première session mercredi 15 et jeudi 16 avril, ce sera la deuxième phase du festival qui aura lieu ces vendredi et samedi. 51 petits films de quelques minutes à peine sélectionnés à partir de 1000 courts métrages proposés. Quatre prix seront décernés à l’issue de la Sélection Internationale du festival : le grand prix, le prix de l’animation, le prix de l’originalité, le prix du public. Chaque séance de visionnage se terminera par le vote du public, puis la diffusion du palmarès. 
Pas plus que dans les festivals de cinéma à plus grande échelle, que ce soit Cannes, Venise ou Berlin, il n’y a de thème unique. Ce n’est pas un concours, mais bien la confrontation de véritables petites œuvres miniatures qui explorent un format habituellement dévolu à la publicité. Les sujets abordés sont aussi variés que la palette que l’on peut trouver au sein des longs métrages, même si l’on peut constater une légère augmentation des thèmes liés à la crise et à la conjoncture mondiale plutôt sombre. 
 
Diversité aussi du côté de l’origine des cinéastes ou du langage choisi : entre films d’animation et documentaires, fictions ou films expérimentaux, tous les registres sont représentés. Du tragique au comique, du plus poétique au plus trash. « Et aux films bien nés, la puissance n’attend pas le nombre des minutes », pourrait-on dire, parodiant Le Cid. On peut, pour s’en convaincre, visionner quelques uns des « très courts » mis en avant sur le site du festival. Le théorème est imparable : il suffit de quelques secondes pour plonger une âme humaine dans l’émotion la plus bouleversante, dont il faut plus longtemps pour se remettre qu’il n’en fallut pour la faire naître. Un bon remède que pourraient conseiller les ophtalmologistes contre la sécheresse oculaire : si vos yeux manquent encore de larmes après avoir vu « La mère à boire » de Claude Brie, le cas est désespéré. Mais pour vous consoler, vous pouvez déguster une tasse de thé avec tout le flegme britannique requis en compagnie de « John et Karen », un ours blanc et un pingouin (de A.Cox Ltd et C. Smith). Délicieux, vraiment.


Voir le site du festival : www.trescourts.com 


Publié dans l'Union sous nom marital le 22 avril 2009
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28 février 2010 7 28 /02 /février /2010 00:35
 De joyeux débuts aux allures de canulars de potaches.

Durant ces deux mois printaniers et jusqu’au 31 mai, les bibliothèques municipales de Reims coordonnent leurs efforts pour offrir à la ville un festival autour des joyeux débuts du cinéma dont tant de premiers essais ressemblent à des plaisanteries de collégiens. Un amusement éphémère, tout au plus. Une fantaisie sans avenir. Qui eût dit en cette fin de XIXème siècle qu’on oserait un jour parler de septième art ? 
Et pourtant, c’est bien en Grèce, la patrie des muses, que l’on alla lui chercher son nom de baptême. Cinéma, en grec, ça veut dire mouvement. C’est la même racine que l’on retrouve dans « kinésithérapeute » : celui qui soigne le mouvement. Le cinématographe, lui, l’écrit, ce mouvement, il l’imprime sur la pellicule, comme le photographe y écrit la lumière et son empreinte. Quelle poésie dans ces simples métaphores dont il ne reste plus que les deux premières syllabes vidées de leur sens : le « ciné » !
Et c’est à la recherche du mouvement perdu que se lancèrent les pionniers de cette épopée encore à écrire. On ne se souvient plus guère aujourd’hui que des frères Lumière, au nom si prédestiné, à la rigueur encore de Georges Méliès. Mais ce sont tous les autres, ceux qui sont tombés dans l’oubli que l’on veut ici sortir de l’ombre : le praxinoscope d’Emile Reynaud, la photographie parlante de Georges Demeny, pour n’en citer que quelques uns.
L’association « Le cinéma s’expose » propose ainsi trois expositions organisées chronologiquement : 
- à la Médiathèque Croix Rouge, « Le pré-cinéma ou l’illusion du mouvement », où l’on pourra s’extasier devant lanternes magiques, zootropes et autres jouets optiques comme les « flip books », ces petits livres à pouce, que l’on feuillette très vite pour que la succession des pages illustrées donne l’illusion du mouvement.
- à la Médiathèque Falala, « La technique au service de l’art » : un peu comme l’homme entre dans l’Histoire avec l’invention de l’écriture, le cinéma quitte sa préhistoire avec la création du cinématographe des frères Lumière, et ce sont les premières caméras, ainsi que divers documents iconographiques et objets d’époque que l’on pourra y admirer.
- à la Médiathèque Laon-Zola enfin, « les prémices du cinéma parlant », deuxième révolution dans la déjà si riche équipée de ce tout jeune art.
En plus de ces expositions, la Médiathèque Falala propose des rencontres, chaque mercredi et jeudi 14 mai ; des projections, bien sûr, chaque samedi après-midi, de documentaires ou d’immortels classiques (Le Cuirassé Potemkine, Le Kid, Chantons sous la pluie,…)
Enfin, chacune des trois bibliothèques anime des ateliers et propose des spectacles, ainsi que le Manège, le 24 avril.
Demandez le programme !



Publié dans l'Union sous nom marital le 11 avril 2009
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31 janvier 2010 7 31 /01 /janvier /2010 22:17

A Reims, en décembre, c’est carnaval. Non pas que tout le monde descende dans la rue déguisé en Arlequin. Non, non, rien d’autre sur les pavés que les habituelles décorations de Noël et les travaux du tramway. Seulement, ce sont les salles de spectacle de la ville qui échangent leurs rôles : la Comédie se prend pour un salon littéraire où l’on cause, et livre sa scène de théâtre, pieds et planches liées, à une bande de poètes et d’écrivains sans scrupules (voir article ci-dessus). Et la Cartonnerie se transforme en cinéma. Quand on sait que le Cinéma Gaumont , de son côté, se prend pour un opéra depuis la rentrée en retransmettant en direct les spectacles du Metropolitan Opera de New York, il est permis de se demander où la valse des salles va s’arrêter. Mais comme c’est pour notre plus grand plaisir, on n’a guère envie de leur demander d’arrêter ce petit manège.

Bref, la semaine prochaine, la Cartonnerie allie musique et cinéma au cours de deux soirées au caractère bien trempé.

Mardi 9 décembre, d’abord, c’est une vigoureuse cure de jouvence que l’on fait subir au bon vieux principe du cinéma muet projeté avec un musicien caché dans la fosse. En effet, ce ne sera pas un piano qui accompagnera la projection d’Aelita, mais le groupe Sporto Rank dont la musique s’inspire d’influences soul, hip-hop et new wave. Aelita, c’est un film de science fiction soviétique et muet tourné en 1924. Un ancêtre. Et il est toujours fascinant de remarquer que la puissance de suggestion d’une œuvre d’art ne se mesure pas à la sophistication de sa technique et de ses effets spéciaux. Que l’on soit écrivain ou cinéaste, on peut faire naître la terreur de la simple évocation d’un brouillard nocturne, sans pour cela tout faire sauter à la dynamite. Là, le spectateur s’évade avec un ingénieur sur Mars pour échapper à un funeste destin et rencontrer une civilisation bien séduisante, autant que sa reine, semble-t-il. On connaissait Mars et Vénus. Voici l’amour entre Mars et un Russe.

Et mercredi 10 décembre, ce sera le cinéaste anglais Peter Greenaway qui rendra hommage, dans un film-portrait, au compositeur Philip Glass. Et l’on peut attendre le meilleur de l’admiration d’un esthète pour un autre. Greenaway, c’est en effet le réalisateur auquel on doit ce chef d’œuvre de cynisme élégant et de beauté glacée qu’est Meurtre dans un jardin anglais. Et Philip Glass, c’est ce compositeur, particulièrement connu pour ses musiques de films (The Truman Show, The Hours, nominés aux Oscars et Golden Globes, pour ne citer qu’eux) qui a porté à sa perfection l’art de la musique minimaliste, qui enveloppe l’oreille dans une suite de phrases répétitives mais infiniment mélodieuses.


Publié dans l'Union sous nom marital le 6 décembre 2008
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Anne Paulerville

  • : La danse du sens
  • : Ce site est un book en ligne où sont archivés la plupart des deux cents articles publiés dans la presse depuis octobre 2008. La consultation par catégories facilite la lecture.
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Il paraît que le sens peut danser sur les mots


Ceci est un book en ligne. Y sont archivés la plupart des deux cents articles publiés dans la presse depuis octobre 2008, toujours au minimum une semaine après leur publication, afin d'y être consultés si besoin est.
La lecture par catégories facilite l'approche.

Nota bene
Ces textes furent rédigés pour une presse dite populaire : la prise en compte du lectorat limite donc l'usage des références culturelles et des figures stylistiques.



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